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Musicien professionnel, Sylvain Freyermuth, lauréat 2024 de notre Concours, est revenu sur le processus qui l’a mené à écrire Spirales. L’occasion aussi pour nous d’en savoir un peu plus sur son rapport à l’écriture.

Comment vous est venue l’idée de cette nouvelle ?
« Elle a été entraînée par le mot spirale qui a d’ailleurs donné son titre à la nouvelle. Ce mot impliquait un enchaînement d’évènements, un engrenage. C’est comme cela que j’ai construit mon récit, avec un effet domino.

L’accouchement a-t-il été long ?
Il y a toujours une première phase durant laquelle on porte l’histoire, où elle se développe en nous sans forcément qu’on l’écrive. Elle se met en place dans votre tête, se nourrit. L’écriture vient après. D’habitude j’aime bien laisser reposer mes histoires, pour y revenir plus tard. Dans le cas de Spirales, l’enchaînement été rapide. Il faut dire que je me suis lancé peu de jours avant la limite d’envoi et j’étais tenu par le temps. La nouvelle a été écrite en deux, trois sessions d’écriture.

Participez-vous souvent à des concours ?
Pas souvent, mais les concours, avec leur cadre, leur thème, leur date limite, sont un moteur pour m’inciter à bouger. J’ai besoin d’une date d’échéance.

Ecrivez-vous beaucoup de nouvelles ?
Oui mais j’aimerais pouvoir m’y consacrer davantage. Malheureusement mon emploi du temps ne me le permet pas actuellement. Il est difficile de mener de front un métier de musicien-compositeur avec la création de textes, même s’il est de nombreuses passerelles entre ces deux types d’écriture. Le texte n’est jamais très loin de mon quotidien. Par exemple, j’ai déjà adapté des poèmes de Victor Hugo ou de George Sand en textes de chansons, en respectant au plus près le texte original. Cela demande de la rigueur et un peu la même énergie que lorsqu’on écrit une nouvelle.

Avez-vous des thèmes ou genres de prédilection ?

Pas particulièrement, et pas davantage le genre policier ou espionnage comme Spirales pourrait le laisser croire. J’affectionne les nouvelles à chute.

Comment vous organisez-vous votre écriture, écrivez-vous selon un rituel ?
J’ai toujours un carnet auprès de moi ou sur moi qui me permet de prendre des notes. J’ai beaucoup de carnets… Trop de carnets (rires). J’aime écrire au stylo. Je n’aime pas trop l’ordinateur et je m’en sers peu, souvent juste pour taper ma première version, brute. Je l’imprime, et là je prends plaisir à la corriger au stylo. Je coupe, j’annote, je fais évoluer le texte, le transforme. J’aime cette étape de construction du texte. Si je ne suis pas fan de l’ordinateur, j’utilise beaucoup le smartphone. Il m’arrive souvent d’écrire à l’extérieur, surtout dans les cafés. Sur un smartphone on se fait plus discret, les gens pensent qu’on tape des messages, ils ne s’imaginent pas qu’on est en train d’écrire. Ça nous rend anonyme. L’écran de l’ordinateur nous met en spectacle, alors qu’il s’agit encore d’une étape de gestation. La projection des mots sur son écran dans un espace public livre notre intimité, alors que le processus doit rester à ce stade intérieur.

Qu’est-ce qui vous inspire en premier lieu ?
L’inspiration peut partir d’une situation, d’un mot. J’aime beaucoup les mots, leur sonorité, leur symbolique, leur étymologie. Si mon travail est avant tout musical, les mots, les phrases, les textes s’accrochent souvent aux notes. Dans la créativité, les uns entraînent les autres. Mon métier m’a souvent donné l’occasion de travailler avec les mots, de les mettre en musique. J’ai écrit des paroles de chansons pour un répertoire personnel, mais aussi pour des commandes de théâtre (sans oublier les marionnettes avec le Théâtre Guignol municipal de Lyon). J’ai notamment mis en musique des extraits en anglais et en français d’Hamlet, interprétés sur scène par des comédiens chanteurs. Chez nos contemporains, j’ai aussi travaillé sur des textes de Valère Novarina (L’Atelier Volant).
Dans cette construction à partir d’œuvres écrites, il faut que la musique ait un sens. Il faut donner aux textes une cohérence de chanson, recréer des structures sans modifier cependant le texte original. C’est un très bon exercice.

Avez-vous touché à d’autres formes d’écriture encore ?
Je ne me suis pas encore laissé tenter par le roman. C’est un voyage pour lequel on se prépare. J’ai écrit des courts-métrages, et un scenario long-métrage aussi qui a demandé une grande discipline de travail. Cela m’a beaucoup aidé à écrire des pièces musicales plus longues.

Avez-vous des auteurs favoris ?
J’aime beaucoup René Frégni*, auteur de nombreux romans souvent classés dans Les genres polar et roman noir, mais dont je retiens surtout la poésie. C’est un auteur qui me touche beaucoup, on sent que dans l’écriture il a mis sa vie en jeu. Même si les thèmes peuvent paraître sombre au premier abord, il les rehausse par la lumière de sa langue, une langue du sud qui se réclame de Giono. J’ai eu l’honneur d’être primé dans un concours de nouvelles dans lequel il présidait le jury. La fiction m’avait amené au réel le plus improbable ! Cela reste un merveilleux souvenir.
J’ai un goût prononcé pour la littérature jeunesse comme on la nomme, même si l’appellation est réductrice. Je citerais Jean-Claude Mourlevat** et Anne-Laure Bondoux*** dont je pense avoir lu tous les ouvrages.
Sinon, je suis impressionné par Haruki Murakami qui a le don d’ouvrir le robinet de l’imaginaire. Sans aucune limite ou presque. Il est un auteur prolifique qui a conscience que son travail à la table nécessite une grande forme physique… Son approche à l’écriture est originale. C’est un très grand sportif, il a été marathonien.
Et puis, avec la récompense pour avoir remporté votre concours j’ai acheté des livres. L’un de mes choix s’est porté sur Jean-Philippe Jaworski****. L’occasion de découvrir ses nouvelles dont une que j’ai particulièrement adorée : Comment Blandin fut perdu. »

​Propos recueillis par Eric Lemaire.
 

*Auteur notamment de : Dernier arrêt avant l’automne ; Minuit dans la ville des songes ; Les vivants au prix des morts.
**Prix commémoratif Astrid-Lindgren 2021.
***Dernier ouvrage paru : Nous traverserons les orages, Gallimard jeunesse 2023 ; Pépite d’or du Salon du Livre et de la Presse jeunesse de Montreuil ; Prix Le Point du livre jeunesse, meilleur roman pour ados. En juin 2024, elle est nommée chevalier de l'ordre national du Mérite.
****Janua Vera, Les moutons électriques, 2007. Gallimard Folio SF n°332 ; Comment Blandin fut perdu, Folio 2€.

 

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